Effet d’homogénéité de l’exogroupe

Sommaire

Tendance à percevoir les membres d’un groupe extérieur comme plus similaires entre eux que les membres de son propre groupe.

Points à retenir

1

Ce biais nous pousse à croire que les individus d’un groupe auquel nous n’appartenons pas sont tous semblables, tandis que nous percevons plus de diversité dans notre propre groupe.

2

Il renforce les stéréotypes et peut conduire à des jugements simplistes ou injustes envers des groupes extérieurs.

3

Ce biais influence la perception des différences culturelles, sociales ou politiques, en exagérant les distinctions entre groupes et en minimisant la diversité interne.

4

Il alimente la polarisation et la méfiance entre les groupes, en donnant l’illusion que "les autres" sont uniformes et prévisibles.

Explication de l'effet d’homogénéité de l’exogroupe

L’effet d’homogénéité de l’exogroupe repose sur un mécanisme cognitif qui nous pousse à voir les membres d’un groupe extérieur comme plus homogènes qu’ils ne le sont en réalité. En revanche, nous percevons une plus grande diversité au sein de notre propre groupe (l’endogroupe). Ce biais est lié à notre façon de traiter l’information : nous avons généralement plus d’interactions et d’expériences variées avec les membres de notre propre groupe, ce qui nous permet de mieux en percevoir les nuances individuelles. À l’inverse, notre exposition limitée aux groupes extérieurs nous conduit à généraliser leurs caractéristiques.

Ce biais joue un rôle clé dans la formation et le maintien des stéréotypes. En percevant un groupe extérieur comme homogène, nous avons tendance à lui attribuer des caractéristiques simplifiées, voire caricaturales, qui ne reflètent pas la diversité réelle des individus qui le composent. Par exemple, une personne peut croire que « tous les touristes d’un pays donné sont bruyants » parce qu’elle n’a rencontré que quelques individus correspondant à cette image, sans prendre en compte les nombreuses variations de comportements au sein de ce groupe.

L’effet d’homogénéité de l’exogroupe est étroitement lié à d’autres biais cognitifs, notamment le biais de catégorisation, qui nous pousse à regrouper automatiquement les individus en groupes distincts, et le biais de confirmation, qui nous amène à privilégier les informations confirmant nos croyances initiales sur un groupe donné.

Une conséquence majeure de ce biais est qu’il favorise la polarisation et les conflits intergroupes. Si nous percevons un groupe extérieur comme uniforme et prévisible, nous sommes moins enclins à interagir avec ses membres individuellement et à reconnaître leur diversité. Cela peut renforcer la méfiance, voire des formes de discrimination. Dans un contexte politique, par exemple, ce biais peut amener des individus à croire que « tous les électeurs d’un parti adverse sont extrêmes » sans prendre en compte les différences internes au sein de ce parti.

Prendre conscience de l’effet d’homogénéité de l’exogroupe permet d’adopter une vision plus nuancée et objective des autres. En multipliant les interactions et en cherchant activement à comprendre les perspectives des groupes extérieurs, il est possible de réduire l’influence de ce biais et d’améliorer la qualité des relations intergroupes.

Origine de l'effet d’homogénéité de l’exogroupe

L’effet d’homogénéité de l’exogroupe a été formalisé dans les années 1980 par des chercheurs en psychologie sociale qui ont étudié la perception des groupes et la formation des stéréotypes. L’un des premiers travaux marquants sur ce biais est l’étude menée par Anthony W. Doise, Willem Doise et Gabriel Mugny sur la perception intergroupe. Ils ont démontré que les individus perçoivent systématiquement plus de diversité au sein de leur propre groupe (l’endogroupe) que chez les groupes extérieurs (l’exogroupe).

Ce biais est également lié aux recherches sur la théorie de l’identité sociale développée par Henri Tajfel dans les années 1970. Tajfel a montré que nous avons une tendance naturelle à diviser les individus en groupes sociaux, ce qui entraîne une distinction entre « nous » (l’endogroupe) et « eux » (l’exogroupe). Ce phénomène se produit même lorsque les groupes sont constitués de manière arbitraire, comme l’a démontré son célèbre paradigme des groupes minimaux. Ses expériences ont révélé que, dès que nous appartenons à un groupe, nous avons tendance à favoriser ses membres et à voir les membres du groupe opposé comme plus homogènes.

D’un point de vue cognitif, ce biais peut s’expliquer par la manière dont nous traitons l’information. Miles Hewstone et Howard Giles, dans leurs recherches sur la perception intergroupe, ont montré que nous avons davantage d’interactions avec les membres de notre propre groupe, ce qui nous permet de remarquer leurs différences individuelles. En revanche, nos contacts avec les groupes extérieurs étant plus limités, nous avons tendance à nous baser sur quelques observations isolées pour généraliser et supposer que « tous les membres de ce groupe sont pareils ».

Les recherches en neurosciences sociales ont également confirmé l’existence de ce biais. Des études utilisant l’imagerie cérébrale ont montré que notre cerveau active des régions différentes selon que nous observons des membres de notre propre groupe ou d’un groupe extérieur. En particulier, l’amygdale, une structure liée aux réactions émotionnelles et à la catégorisation sociale, est plus active lorsqu’une personne perçoit un membre d’un exogroupe, ce qui peut renforcer une perception stéréotypée et homogène.

Sur le plan évolutionniste, certains chercheurs, comme John Tooby et Leda Cosmides, suggèrent que ce biais a pu être un mécanisme de survie. Dans les sociétés anciennes, identifier rapidement qui faisait partie de son propre groupe et qui était un « étranger » pouvait être crucial pour assurer la coopération et la protection. Toutefois, dans nos sociétés modernes, ce biais peut alimenter des divisions sociales, des conflits et des discriminations.

Aujourd’hui, l’effet d’homogénéité de l’exogroupe est très étudié en psychologie sociale et cognitive, notamment pour comprendre comment il influence la formation des préjugés et la dynamique des groupes. Des stratégies comme l’exposition à la diversité, l’éducation interculturelle et la prise de perspective sont utilisées pour atténuer ce biais et favoriser des interactions plus nuancées entre les groupes sociaux.

Exemples de l'effet d’homogénéité de l’exogroupe

Société

Une personne peut penser que "tous les jeunes d’aujourd’hui" ont les mêmes valeurs et comportements, alors qu’elle perçoit plus de diversité parmi les individus de sa propre génération.

Politique

Un électeur peut croire que tous les partisans d’un camp opposé ont les mêmes idées extrêmes, alors qu’il reconnaît une diversité d’opinions au sein de son propre groupe politique.

Sport

Les supporters d’une équipe peuvent voir les fans d’une équipe rivale comme "tous arrogants", alors qu’ils perçoivent leur propre camp comme composé de personnalités variées.

Travail

Un employé d’un département peut penser que "les commerciaux sont tous opportunistes", alors qu’il reconnaît des personnalités diverses dans son propre service.

Pour aller plus loin

Biais de l'homogénéité de l'exogroupe - Shortcorgs

Le biais d'homogénéité de l'exogroupe - Andréanne Veillette

La psychologie des préjugés : Un aperçu - Understanding Prejudice

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