Biais de normalité

Sommaire

Tendance à ignorer les risques d'événements rares, en supposant que le futur ressemblera au passé.

Points à retenir

1

Le biais de normalité amène les individus à ignorer les signaux d'alerte d'événements peu fréquents ou catastrophiques, les considérant improbables simplement parce qu'ils ne font pas partie de leur expérience quotidienne.

2

Ce biais peut entraîner un manque de préparation face à des situations d'urgence ou des catastrophes naturelles, car les gens s'attendent à ce que rien ne change.

3

Affecte la prise de décision en matière de sécurité et de politiques publiques, souvent en retardant les réponses nécessaires jusqu'à ce que l'évidence du danger soit indéniable.

4

La force de ce biais peut varier selon les cultures et les expériences personnelles, certains groupes ou individus étant plus susceptibles de reconnaître les risques en fonction de leur histoire ou de leur exposition antérieure à des crises.

Explication du biais

L’explication du biais de normalité réside dans la tendance psychologique à sous-estimer la probabilité ou l’impact de situations qui semblent inhabituelles ou irrégulières, basée sur l’expérience personnelle que les choses restent généralement constantes.

Le biais de normalité affecte notre capacité à répondre adéquatement aux avertissements et à nous préparer pour des événements rares mais catastrophiques. Ce phénomène est souvent observé dans des contextes tels que les réponses aux désastres naturels, les marchés financiers, ou la sécurité nationale. Par exemple, avant des désastres naturels majeurs comme des ouragans ou des tsunamis, des habitants et même des autorités peuvent ignorer les avertissements, croyant que l’événement ne sera pas aussi grave qu’annoncé, ou que cela ne perturbera pas la normalité de leur vie quotidienne.

En termes de neurosciences, le biais de normalité peut être enraciné dans un mécanisme de défense cognitif qui aide à maintenir une stabilité émotionnelle. Admettre la réalité d’une menace potentielle ou d’un changement important nécessite une reconfiguration de notre compréhension du monde, ce qui peut être mentalement et émotionnellement coûteux. Par conséquent, minimiser ces risques permet de maintenir un sentiment de normalité et de contrôle.

D’autre part, ce biais peut aussi être vu comme un effet de l’habitude ou de la routine. Les individus développent des modèles de compréhension du monde qui sont renforcés par des expériences quotidiennes répétées. Lorsque ces modèles sont soudainement défiés par des situations anormales, le cerveau peut avoir du mal à s’adapter rapidement, ce qui conduit à une sous-évaluation des risques ou des menaces.

En comparaison, des biais comme l’optimisme irréaliste ou l’effet autruche, où les gens évitent activement des informations négatives ou menaçantes, montrent également comment les attentes et les croyances antérieures peuvent façonner de manière inappropriée notre interprétation des signaux et des avertissements. Ces biais, y compris celui de normalité, illustrent une tendance humaine générale à privilégier le confort psychologique de la familiarité et de la continuité, parfois au détriment de notre bien-être ou de notre survie.

Origine du biais

L’origine du biais de normalité est ancrée dans la psychologie humaine et son développement peut être tracé à travers diverses observations et études au fil des années, bien qu’aucun chercheur unique ne soit crédité de sa première identification. Ce biais émerge de la tendance innée des humains à privilégier la stabilité et la constance dans leur environnement, un trait qui a probablement offert des avantages évolutifs en permettant aux individus de créer et maintenir des routines sécurisantes et prévisibles.

Historiquement, le biais de normalité peut être vu dans de nombreux contextes où les avertissements de dangers imminents ont été ignorés en faveur de la croyance que les choses continueront comme avant. Ce phénomène a été particulièrement notable et tragiquement illustré dans des catastrophes naturelles et des crises majeures. Par exemple, lors du Titanic, malgré de nombreux avertissements de glace dans l’Atlantique Nord, la perception que le navire était « insubmersible » a contribué à une sous-évaluation du risque réel, ce qui a mené à la désastreuse nuit du naufrage.

En psychologie académique, le biais de normalité a été exploré en profondeur dans le contexte de la gestion des risques et des réponses aux désastres. Des chercheurs comme Neil D. Weinstein, qui a développé le concept de « réalisme irréaliste » dans les années 1980, ont contribué à façonner notre compréhension de comment et pourquoi les gens sous-estiment souvent la probabilité d’événements négatifs dans leur propre vie, un concept étroitement lié au biais de normalité.

Le biais est également étudié dans le cadre de la planification urbaine et de la préparation aux catastrophes. Les chercheurs ont examiné comment la conception des villes et les réglementations peuvent souvent refléter une attente de « normalité », ignorant les risques bien documentés de phénomènes naturels extrêmes ou de changements climatiques. Ces études mettent en lumière la manière dont les croyances institutionnalisées dans la continuité et la stabilité peuvent entraver les efforts de préparation et de mitigation.

En somme, le biais de normalité n’est pas l’œuvre d’un seul théoricien ou chercheur, mais plutôt un concept qui a évolué au sein de la psychologie et d’autres disciplines qui s’intéressent à la manière dont les gens perçoivent et réagissent aux changements et aux risques. Sa reconnaissance et son étude continuent de jouer un rôle crucial dans la compréhension de nos réponses aux menaces et aux urgences, soulignant l’importance de dépasser notre confort psychologique pour une évaluation plus réaliste et proactive des risques.

Exemples

Urgence

Les autorités locales d'une ville côtière ignorent les avertissements de tempête imminente, convaincues par des années sans événements majeurs que le risque est minime. Ce refus de préparer des évacuations ou de renforcer les infrastructures peut entraîner des dégâts sévères et des pertes en vies humaines.

Finance

Un investisseur continue d'acheter des actions d'une entreprise malgré des signes clairs de déclin financier, persuadé que les petits revers sont temporaires et que « tout reviendra à la normale ».

Santé

Les citoyens lors de l'apparition d'une nouvelle maladie infectieuse, ne suivent pas les recommandations de prévention, comme la vaccination ou le port du masque, parce qu'ils ne croient pas que la maladie les affectera personnellement.

Personnel

Une personne vit dans une zone fréquemment touchée par des inondations mais refuse de souscrire une assurance inondation ou de déménager, convaincue que les événements passés étaient des anomalies et que sa maison ne sera pas affectée à nouveau.

Pour aller plus loin

Biais de normalité : quand on ne voit pas les risques - Nos Pensées

Le biais de normalité… notre terrible ennemi - Insolentiae

Les dangers du biais de normalité - Québec Preppers

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