Faux souvenirs

Sommaire

Tendance à se rappeler de manière inexacte des événements passés ou à fabriquer des souvenirs qui ne se sont jamais produits.

Points à retenir

1

Les faux souvenirs démontrent que notre mémoire n'est pas un enregistreur fidèle d'événements, mais plutôt un système constructif qui réinterprète et reconstruit le passé.

2

Les faux souvenirs peuvent être induits par des suggestions, des informations erronées ou des questions suggestives, soulignant la susceptibilité de la mémoire aux influences externes.

3

Les individus peuvent avoir une confiance élevée dans l'exactitude de leurs souvenirs, même lorsqu'ils sont faux, ce qui peut mener à des convictions erronées ou à des accusations injustifiées.

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Les faux souvenirs peuvent avoir des répercussions graves, notamment dans le système judiciaire, où ils peuvent influencer les témoignages et les verdicts.

Explication du biais

L’explication du phénomène des faux souvenirs explore comment notre mémoire peut être façonnée, altérée ou même créée de toutes pièces, illustrant une vulnérabilité fondamentale de notre cognition. Les faux souvenirs ne sont pas simplement des oublis ou des distorsions mineures de la réalité, mais des reconstructions ou des fabrications de souvenirs d’événements qui ne se sont jamais produits ou qui ont été vécus différemment.

Les faux souvenirs peuvent être comparés au biais de confirmation, un autre biais cognitif qui influence notre façon de percevoir et de se rappeler des informations. Tandis que le biais de confirmation nous pousse à rechercher, interpréter et se rappeler des informations qui confirment nos croyances préexistantes, les faux souvenirs montrent comment notre mémoire peut être influencée pour se conformer non seulement à nos croyances mais aussi à des suggestions externes, souvent sans notre conscience. Par exemple, lors d’une séance de psychothérapie, des questions suggestives pourraient amener une personne à se remémorer des événements qui n’ont jamais eu lieu, de manière similaire à comment le biais de confirmation pourrait nous amener à ignorer des informations qui contredisent nos opinions.

Les faux souvenirs sont souvent induits par des techniques de suggestion lors des interrogatoires ou dans des contextes thérapeutiques, où des questions mal formulées ou des suppositions peuvent amener les individus à croire en des souvenirs qui sont en réalité des constructions influencées par le contexte ou les attentes de l’interrogateur. Les recherches menées par des psychologues tels qu’Elizabeth Loftus ont démontré que les faux souvenirs peuvent être implantés assez facilement en racontant à des personnes des événements fictifs de manière répétée, ce qui amène à les intégrer dans leur propre récit de vie comme étant vrais.

L’effet de ces souvenirs n’est pas trivial : ils peuvent avoir des conséquences profondes et durables, affectant les décisions judiciaires, les relations personnelles, et la perception de soi. Par exemple, dans le domaine judiciaire, des témoins peuvent être convaincus d’avoir vu un suspect lors d’un crime à cause des faux souvenirs induits par la manière dont les questions leur sont posées. De même, en thérapie, des individus peuvent se convaincre d’avoir vécu des événements traumatisants qui ne se sont jamais produits, influençant grandement leur processus de guérison et leur bien-être.

Ces mécanismes soulignent une dimension essentielle de notre fonctionnement psychologique : notre mémoire n’est pas une entité statique, mais un processus dynamique qui interagit continuellement avec notre environnement, nos expériences et nos croyances. En comprendre les vulnérabilités comme celles exposées par les faux souvenirs est crucial pour développer des méthodes plus fiables d’interrogation, de thérapie et d’éducation qui prennent en compte la malléabilité de la mémoire humaine.

Origine du biais

L’origine du phénomène des faux souvenirs a été largement étudiée et documentée par des chercheurs en psychologie cognitive et en neuropsychologie. L’une des figures les plus influentes dans l’étude des faux souvenirs est Elizabeth Loftus, une psychologue américaine renommée pour ses travaux sur la malléabilité de la mémoire humaine. Loftus a mené plusieurs expériences emblématiques qui ont mis en lumière la facilité avec laquelle les souvenirs peuvent être manipulés ou fabriqués par des suggestions extérieures.

Dans les années 1970, Loftus a commencé à explorer comment les questions suggestives pouvaient altérer les souvenirs des témoins oculaires. Ses études ont démontré que non seulement les souvenirs pouvaient être changés après un événement, mais que de nouveaux souvenirs totalement fictifs pouvaient être créés à travers des suggestions répétées ou des informations trompeuses fournies après l’événement. Ces découvertes ont lancé un nouveau domaine de recherche qui a examiné la fiabilité des témoignages oculaires et l’impact des techniques d’interrogatoire sur la mémoire.

En plus de Loftus, d’autres chercheurs ont contribué à notre compréhension des faux souvenirs. Par exemple, les psychologues Daniel Schacter et Endel Tulving ont apporté des éclaircissements sur les processus neuronaux et cognitifs sous-jacents aux faux souvenirs. Schacter a identifié les « sept péchés de la mémoire », un cadre qui décrit les différentes façons dont la mémoire peut nous tromper, les faux souvenirs étant l’un de ces « péchés ».

Des études ultérieures ont utilisé des technologies d’imagerie cérébrale pour observer comment les faux souvenirs sont codés dans le cerveau. Ces recherches ont montré que les faux souvenirs activent des régions du cerveau similaires à celles utilisées pour les souvenirs authentiques, ce qui suggère que le cerveau peut ne pas faire de distinction claire entre les vrais et les faux souvenirs au niveau neuronal.

La recherche sur les faux souvenirs a également été stimulée par des cas très médiatisés dans les tribunaux, où des personnes ont été condamnées sur la base de témoignages plus tard révélés comme étant basés sur des souvenirs implantés ou manipulés. Ces cas ont souligné l’importance de comprendre et de limiter l’effet des faux souvenirs dans le système judiciaire.

En résumé, l’étude des faux souvenirs a évolué grâce aux contributions de nombreux chercheurs qui ont exploré comment notre mémoire n’est pas une simple reproduction de la réalité, mais plutôt une construction complexe et influençable, mettant en lumière les limites et les vulnérabilités de la mémoire humaine.

Exemples

Psychologie

Un participant à une étude se souvient avoir été perdu dans un centre commercial durant son enfance après que le chercheur ait implanté faussement ce souvenir, bien que cela ne soit jamais arrivé.

Système judiciaire

Un témoin d'un crime rapporte avoir vu un suspect sur la scène du crime avec des détails précis sur son apparence et ses actions, influencé par des photos ou des informations vues après l'événement, alors que cette personne n'était pas présente.

Quotidien

Une famille se rappelle d'un événement de vacances spécifique avec des détails que chaque membre raconte différemment, certains détails étant ajoutés ou modifiés par les récits partagés au fil du temps.

Thérapie

Un patient développe des souvenirs d'événements traumatisants qui n'ont pas réellement eu lieu, suite à des questions suggestives ou des hypothèses de son thérapeute, affectant sa perception de son passé et son bien-être émotionnel.

Pour aller plus loin

Syndrome des faux souvenirs : c'est quoi ? - Le Journal des Femmes

Souvenirs, souvenirs - Afis

Faux souvenirs - Wikipédia

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